La Cour de cassation française a validé la transcription d’un mariage homosexuel entre un Français et un Marocain, malgré l’interdiction explicite prévue par la loi marocaine. Cette décision, rendue en mars 2024, s’appuie sur l’incompatibilité de la convention bilatérale franco-marocaine avec la protection des droits fondamentaux garantis en France.
Au Maroc, l’article 489 du Code pénal criminalise toujours les relations entre personnes de même sexe. Les autorités poursuivent régulièrement des citoyens pour homosexualité, sur la base de preuves numériques ou de dénonciations. Aucun projet de réforme n’est annoncé à ce jour.
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Plan de l'article
- Où en sont les droits des personnes LGBT au Maroc en 2025 ?
- Le mariage homosexuel à l’international : reconnaissance, limites et avancées
- La décision de la Cour de cassation française : un tournant pour les couples franco-marocains
- Quels enjeux juridiques et sociaux pour les couples de même sexe entre la France et le Maroc ?
Où en sont les droits des personnes LGBT au Maroc en 2025 ?
En 2025, la situation reste figée pour les personnes LGBT au Maroc. La loi, portée par l’article 489 du code pénal, continue de punir les relations homosexuelles de peines de prison pouvant aller jusqu’à trois ans. Depuis l’affaire très médiatisée de Ksar Kebir en 2023, rien n’a bougé sur le plan législatif. Le mariage homosexuel au Maroc demeure strictement prohibé. Tenter une union civile ou religieuse entre personnes de même sexe expose immédiatement à des poursuites et à l’exclusion.
La société civile, malgré les obstacles, s’efforce de rendre visible ce qui se vit dans l’ombre. Plusieurs associations, souvent contraintes de s’organiser à l’étranger, recueillent des témoignages, alertent sur les discriminations et orientent vers une aide juridique. Mais, concrètement, la peur de la dénonciation domine les quotidiens, muselant toute tentative d’affirmation dans l’espace public. Les réseaux sociaux, pour certains, offrent un abri, mais se transforment aussi en piège : la police numérique déploie une vigilance constante, traquant les conversations privées.
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Côté institutions, le silence reste la règle. Aucun texte de loi, aucune proposition de réforme ne figure à l’ordre du jour. Les débats sur la dépénalisation sont soigneusement évités, que ce soit dans l’hémicycle ou dans les médias marocains. Tradition et religion verrouillent toute ouverture. Quant à la justice, elle applique la loi à la lettre, sans laisser entrevoir le moindre infléchissement.
Dans les familles, la stigmatisation impose le silence ou le déni. Ceux qui font le choix de partir vers l’Europe y voient souvent la seule échappatoire, même si cela signifie couper les liens avec leur environnement d’origine. Quant aux couples mariés à l’étranger, aucune reconnaissance n’est possible au Maroc : la double peine pour les couples binationaux s’installe, entre exclusion sociale et invisibilité juridique.
Le mariage homosexuel à l’international : reconnaissance, limites et avancées
Sur la scène mondiale, le tableau est tout autre. Le mariage homosexuel s’est imposé dans la plupart des pays d’Europe occidentale, du Portugal à la Slovénie, tandis qu’en Serbie ou au Monténégro, seule l’union civile pointe timidement. Cette disparité saute aux yeux : d’un côté, les droits familiaux s’élargissent, les mariages sont célébrés, de l’autre, les frontières juridiques restent fermées pour les Marocains.
Mais la reconnaissance ne va jamais de soi. Un mariage homoparental conclu à l’étranger ne produit aucun effet légal au Maroc, même si l’un des conjoints est marocain. Chaque État garde la main sur ses règles : le droit international privé n’impose rien. Les conséquences sont très concrètes : absence de filiation reconnue, impossibilité de transmettre un héritage, droits parentaux inexistants.
Pour mieux comprendre cet éclatement des régimes, voici quelques situations selon les pays :
- Portugal, Espagne, France : mariage homosexuel pleinement reconnu
- Slovénie : ouverture récente du mariage gay
- Serbie, Monténégro, Kosovo, Bosnie-Herzégovine : union civile parfois tolérée mais mariage non reconnu
Le public international évolue vers plus d’inclusion, mais à des vitesses inégales. Les couples binationaux, notamment entre la France et le Maroc, avancent entre optimisme et frustration. Les récentes discussions à Bruxelles ou à Strasbourg montrent que le sujet progresse, mais l’harmonisation reste une promesse lointaine.
La décision de la Cour de cassation française : un tournant pour les couples franco-marocains
En mars 2024, la Cour de cassation française a brisé un verrou : désormais, la convention franco-marocaine de 1981 ne peut plus empêcher la célébration d’un mariage homosexuel entre un Français et un Marocain en France. L’argument de l’ordre public international français s’est imposé : l’article 143 du Code civil, qui consacre le mariage pour tous, prend le dessus sur toute clause jugée incompatible avec les droits fondamentaux.
Cette décision a mis fin à des années de blocage. Jusqu’ici, des couples voyaient leur dossier suspendu, parfois annulé, au nom de la convention bilatérale. La cour d’appel de Chambéry avait amorcé un changement, mais la sécurité juridique manquait. La Cour de cassation a posé un cadre clair : l’officier d’état civil n’a plus le droit de refuser le mariage d’un couple homosexuel franco-marocain, même si la législation marocaine l’interdit.
Ce basculement modifie les pratiques administratives. Les couples binationaux disposent dorénavant d’un appui juridique solide. En France, leur mariage est pleinement reconnu. Pourtant, la question reste épineuse dès que l’on franchit la Méditerranée : au Maroc, rien ne change, et le risque demeure pour les ressortissants marocains. Mais sur le sol français, la jurisprudence est désormais ferme. Les défenseurs des droits, les juristes, les chercheurs de la Sorbonne saluent cette avancée, qui dépasse le cercle des spécialistes pour toucher les familles concernées.
Quels enjeux juridiques et sociaux pour les couples de même sexe entre la France et le Maroc ?
Pour chaque couple marié en France, dont l’un des partenaires est marocain, la réalité est double : la France accorde une pleine reconnaissance, le Maroc ne concède rien. Depuis la décision de la Cour de cassation, la convention franco-marocaine ne fait plus barrage en France, mais ce droit s’arrête abruptement à la frontière marocaine.
Une dualité de statuts
Voici comment se déclinent les droits de part et d’autre de la Méditerranée :
- En France : le mariage homosexuel donne accès à l’ensemble des droits sociaux, à l’adoption, à la succession. Les officiers d’état civil ne peuvent plus invoquer la convention pour refuser une union.
- Au Maroc : la loi reste inflexible. L’homosexualité continue d’être passible de prison (article 489), et la notion de mariage pour les personnes de même sexe n’existe pas. Toute tentative s’expose à des poursuites.
Cette fracture juridique fragilise les couples homosexuels binationaux. Les droits acquis en France, adoption, protection sociale, transmission de patrimoine, disparaissent dès lors que la réalité marocaine s’impose. Pour ces couples, chaque voyage, déplacement temporaire, ou rupture familiale devient une zone d’incertitude, où l’insécurité juridique s’ajoute à la peur du rejet.
Les spécialistes du droit privé international s’interrogent aussi sur la portée symbolique de cette avancée française. Un mariage reconnu ici, nié là-bas : la question de la souveraineté nationale, de la circulation des personnes et de la protection des droits individuels reste entière. Pour les futurs époux, la vigilance demeure : célébrer une union en France n’offre ni immunité, ni reconnaissance sociale de l’autre côté de la Méditerranée.
Au bout du compte, chaque couple bouscule les frontières du droit, mais aussi celles de l’acceptation. Pour l’instant, la reconnaissance circule à sens unique, et le retour au Maroc s’accompagne toujours d’une ombre portée.